Contrat de rivière Dyle-Gette

jeudi 18 avril 2024

Le Décret nouveau est (enfin) arrivé !

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Le Brocuy à Jodoigne

Cela faisait un bon bout de temps que nous l’attendions : le nouveau Décret sur les cours d’eau est entré en vigueur le 15 décembre 2018 ! Quel beau cadeau de Noël !
Il faut dire que cette réforme du cadre juridique sur les cours d’eau a mis du temps pour aboutir : la Direction des cours d’eau non navigables au sein du SPW-DGO3 (nouvelle dénomination : SPW-ARNE) avait lancé le processus en 2012 !
L’intention était particulièrement ambitieuse : « instaurer un cadre juridique global et transversal de la gestion intégrée, équilibrée et durable des cours d’eau wallons ».
Adopté par le Parlement wallon le 4 octobre 2018, le Décret a été publié au Moniteur belge le 5 décembre 2018. Voici donc enfin abrogée l’illustre Loi du 28 décembre 1967 ( !) sur les cours d’eau non navigables. Le Code de l’Eau se voir ainsi enrichi du principal article qui lui faisait encore défaut (cfr art.D.33 à D.54/1).

Au total, il s’agissait de répondre à 3 besoins essentiels nouveaux :

  • celui de gérer les cours d’eau dans le respect des grands principes dictés par la Directive cadre Eau (2000) et de la Directive Inondations (2007)
  • celui d’autoriser des travaux aux cours d’eau réalisés par des tiers
  • celui de contrôler et surveiller (pouvoirs d’intervention et de sanction)

Attention cependant : certaines dispositions du nouveau Décret s’appliquent depuis son entrée en vigueur, mais d’autres nécessitent des dispositions d’exécution reprises dans un arrêté d’exécution encore en phase d’adoption à l’heure actuelle.
A noter que la législation sur les wateringues (Loi du 5 juillet 1956) a aussi été réformée via le nouveau Décret. 

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Vallée du Nil à Walhain Vallée du Ruisseau du Village à Orp-Jauche

Question de vocabulaire ?

Tout d’abord, pour les puristes, quelques définitions faisaient cruellement défaut dans le Code de l’Eau, ce qui amenait à des interprétations diverses et variées : « cours d’eau non navigable ou cours d’eau non classé », « berge », « lit mineur », « crête de berge » ou « obstacle à la libre circulation des poissons » ne devraient dorénavant plus avoir de secret pour personne... Cela peut paraître anodin, mais sachez par exemple que les berges d’un cours d’eau se voient ainsi officiellement reconnues comme faisant partie intégrante du cours d’eau !
Quant aux cours d’eau dits « navigables », on les appellera désormais « voies hydrauliques ».

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Le "lit mineur" du cours d'eau comprend son chenal d'écoulement  (avant débordement) et ses berges jusqu'à la crête de berge

Maintien des 3 catégories de cours d’eau et de gestionnaires

La détermination des tronçons « administratifs » est maintenue :

  • 12.000 km de cours d’eau non classés » (gestionnaire = le riverain)
  • 4.370 km de cours d’eau de 3ème cat (gestionnaire = la Commune)
  • 5.800 km de cours d’eau de 2ème cat (gestionnaire = la Province)
  • 1.860 km de cours d’eau de 1ère cat (gestionnaire = la Région)

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Des perspectives encourageantes

Finalement, ce sont 12.000 km de cours d’eau « classés » en Wallonie qui sont visés par ces nouvelles règles. Elles visent à privilégier un plus grand respect des caractéristiques naturelles des cours d’eau tout en conciliant aussi les impératifs de la lutte contre les risques d’inondations et les fonctions économiques, socio-culturelles ou touristiques de certains cours d’eau : un fameux challenge à relever pour les administrations gestionnaires (Communes, Provinces et Région wallonne) !

Une gestion intégrée, équilibrée et durable des rivières et ruisseaux : cela pourrait ouvrir la porte à des pratiques nouvelles, à des formes d’interventions, de projets ou d’actions que le Contrat de rivière Dyle-Gette défend et promeut depuis sa mise en place dans les années ’90. Gageons que le nouveau Décret rendra dorénavant plus facile le développement de projets intégrés sur le terrain :

  • levées d’obstacles au déplacement des poissons (suppression ou contournement des chutes d’eau)
  • préservation/restauration de la ripisylve (protection ou gestion des bandes boisées le long des cours d’eau)
  • plus grande prise en compte de la dynamique naturelle du cours d’eau (reméandration des cours d’eau, redéveloppement du concept (ancien) d’espace de liberté pour les cours d’eau...)
  • reconnexion des cours d’eau avec les zones humides situées dans leurs plaines alluviales...

La lutte contre les espèces invasives le long des cours d’eau fait aussi partie des objectifs.

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Levée d'un obstacle au déplacement des poissons, sur la Lasne à Rixensart en 2018 (MO : Province BW) Reméandration d'un tronçon de la Lasne à Rixensart en 2018
(MO : Province BW)
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Eradication de la Balsamine de l'Himalaya sur la Houssière à Chastre en 2014    Gestion de la ripisylve sur le Smohain à Lasne en 2011
(MO : Commune de Lasne)

Toutes ces actions de terrain pourraient avoir des impacts positifs sur développement de la flore et la faune aquatiques et donc sur la qualité écologique des cours d’eau (obligation de résultats vis-à-vis de la Directive cadre-Eau).

Le Programme P.A.R.I.S. : késako ?

On a déjà présenté brièvement dans une Lettre d’info précédente le nouveau mode de gestion coordonnée des cours d’eau à l’échelle de la Région wallonne: le programme « PARIS », déjà initié avant l’adoption du nouveau Décret « cours d’eau ».

Sachez que le nouveau Décret fixe notamment la procédure d’élaboration des P.A.R.I.S. : une meilleure coordination entre les différents gestionnaires de cours d’eau sera notamment opérée via l’utilisation d’un outil d’encodage commun (le logiciel « PARIS).
C’est ainsi que 6.200 secteurs de cours d’eau ont été cartographiés, présentant chacun des caractéristiques homogènes.
Chaque secteur se verra attribuer des enjeux et objectif de gestion (hydraulique, écologique, socio-économique et/ou socio-culturel), débouchant sur l’application de mesures de gestion et sur des programmes d’actions.
Le CRDG reviendra sur le sujet dans une prochaine Lettre d’info.

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Secteur du Poucet (à Hannut) susceptible de présenter un enjeu de type "inondation" Secteur du Blanc-Ry (à Ottignies-LLN) présentant un enjeu de type "biodiversité"

Un nouveau régime pour les travaux sur les cours d’eau

On distingue dorénavant les travaux « d’entretien et de petite réparation » et les travaux « soumis à autorisation domaniale ».

Les travaux légers de maintenance (nettoyage/curage du cours d’eau, consolidation de berge, petite réparation d’ouvrage public, entretien de la végétation de berge,...) continuent à relever de la responsabilité de chaque gestionnaire. Il n’y a pas de procédure d’autorisation pour ces travaux, pas d’évaluation des incidences sur l’environnement, pas d’enquête publique.
Dans certains cas, une concertation avec le SPW-DNF est à prévoir.
A noter que les particuliers/riverains peuvent exécuter certains travaux d’entretien et de petite réparation moyennant une procédure de déclaration.
A noter aussi que la tutelle d’avis de la Province est maintenue : elle émet un avis technique préalable sur les travaux envisagés par les gestionnaires communaux.

 

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Curage sur le Ri des Corrées à Ramillies en 2016 (MO : Commune de Ramillies) Curage sur la Dyle à Genappe en 2018 (MO : Province BW) 
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Réfection de mur sur la Dyle à Genappe en 2017 (MO : Province BW)
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Réfection de berge sur la Grande Gette à Jodoigne en 2017 (MO : SPW-DCENN)

Les travaux plus conséquents (approfondissement , élargissement, rectification du cours d’eau, donc plus généralement toute modification du lit mineur ou des ouvrages y établis) qui sont réalisés par une personne de droit privé ou de droit public (sauf le gestionnaire) sont soumis à autorisation préalable auprès du gestionnaire du cours d’eau. Ces projets sont susceptibles de nécessiter aussi l’obtention préalable d’autres permis (environnement, urbanisme...). L’autorisation à obtenir peut être assortie de conditions particulières.
Le Décret précise la procédure de délivrance de cette autorisation domaniale. Il n’y a pas d’enquête publique (de toute façon, il est susceptible d’y en avoir dans le cadre de la délivrance d’un permis d’environnement ou d’urbanisme). Une concertation avec le SPW-DNF est d’office organisée (au minimum, une demande d’avis ; au besoin, une visite de terrain). A noter que le Décret ne précise rien sur les modalités de contrôle des travaux.

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Modification du Ri de Glory à Court-St-Etienne en 2015 (MO : ?) Modification du Piétrebais à Grez-Doiceau en 2014 (MO : Commune de Grez-Doiceau)

Mais encore....

  • Le CoDT stipule (art R.IV.35-1) que les gestionnaires de cours d’eau doivent être consultés en cas de demande de permis pour un projet (situé en bordure de cours d’eau) susceptible d’avoir une incidence sur le cours d’eau non navigable ou pour un projet situé en zone d’aléa d’inondation.
  • Si un danger met gravement en péril le cours d’eau (= sécheresse), l’autorisation domaniale obtenue peut être modifiée, suspendue ou retirée.
  • L’obligation pour les riverains de livrer le passage aux gestionnaires et de leur laisser déposer matières et matériaux est maintenue.
    Pour les cours d’eau non classés (gestionnaire = le riverain), les règlements provinciaux vont devoir être harmonisés. De plus, le Gouvernement wallon est habilité à fixer certaines règles (entretien, autorisation pour travaux, plantations, constructions...).

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Le CoDT est dorénavant plus contraignant en ce qui concerne les remblais en fonds de vallée
(ici, le long de l'Ardenelle à Chastre en 2017)
Les dépôts de matières à moins de 6 mètres de la crête de berge deviennent
des infractions de "3ème catégorie"
(ici, le long du Schoorbroek à Beauvechain en 2005)

Un système infractionnel renforcé

Le Décret intègre et précises toute une série de nouvelles infractions relatives aux cours d’eau non navigables :

  • entrave à la libre circulation des poissons ;
  • non respect du débit réservé imposé ;
  • exécution de certains travaux d ‘entretien ou de petite réparation sans déclaration préalable ;
  • réalisation ou maintien de travaux sans autorisation domaniale du gestionnaire

Des infractions déjà existantes de 4ème catégorie dans l’ancienne législation deviennent des infractions de 3ème catégorie :

  • dégrader ou affaiblir le lit mineur ;
  • obstruer un cours d’eau ou déposer des objets ou matières à moins de 6 mètres de la crête de berge si risque d’être entraînés par les flots ;
  • ne pas respecter l’obligation de clôturer les pâtures en bordure de cours d’eau ;
  • labourer ou ameublir la bande de terre d’une largeur de 1 mètre à partir de la crête de berge.

D’autres infractions restent de 4 ème catégorie, mais ont été légèrement modifiées.
Pour les cours d’eau non classés, un AGW est en projet.

 

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Le non respect de l'obligation de clôturer les pâtures le long des cours d'eau devient
une infraction de "3ème catégorie" (ici, la Petite Gette à Orp-Jauche en 2015)
Le labour à moins d'1 mètre de la crête de berges devient
une infraction de "3ème catégorie" (ici, le long du Ruisseau
des 7 Bonniers de Bilande à Wavre en 2009)

Un gros effort de communication de la part du SPW-DCENN

4 matinées d’information décentralisées ont été organisées à l’attention des communes (les 15, 19, 21 & 22 mars 2019), du fait de leur compétence comme gestionnaires des cours d’eau dit « de 3ème catégorie » : ces réunions ont rassemblé plus de 400 personnes, représentant plus de 200 communes (dont une 20 aine de communes du Brabant wallon).
Les 14 contrats de rivière de Wallonie ont pu se glisser dans le public, au titre d’acteurs « indirects » dans la mise en œuvre de ce nouveau cadre législatif.

Plusieurs supports de communication vulgarisés ont été diffusés (voir en fin d’articles).
Un nouveau guide juridique sur les cours d’eau sera rédigé lorsque les arrêtés d’exécution manquants auront été fixés.
Un atlas des cours d’eau numérique est désormais disponible en ligne sur le géoportail wallon ou sur environnement.wallonie.be/cartosig/atlascenn/
Deux séances de formation des agents communaux à l’utilisation du logiciel « PARIS » sont programmées courant octobre et novembre 2019.

Documents téléchargeables pour en savoir plus :

- dépliant de présentation du nouveau Décret : http://environnement.wallonie.be/OH/base-decretale-A4-2019.pdf
- dépliant de présentation du programme P.A.R.I.S. : http://environnement.wallonie.be/OH/p-a-r-i-s-A4-2019.pdf
- page web dédiée au nouveau cadre juridique « cours d’eau » : http://environnement.wallonie.be/cgi/dgrne/plateforme_dgrne/news/visiteur/displaynews.cfm?idnews=611&langue=FR
- Présentation du nouveau Décret (séminaires pour les communes, mars 2019) 
- vidéo de présentation du nouveau Décret (idem) : https://youtu.be/wJl958BX64Q
- note de présentation du nouveau Décret : http://environnement.wallonie.be/OH/2019.01.01-Note-de-presentation-decret-cours-d-eau-et-tableau.pdf
- version coordonnée de la partie décrétale du Livre II du Code de l’Eau (en particulier ses titres V (Cours d’eau) et VI (Wateringues) : http://environnement.wallonie.be/legis/Codeenvironnement/codeeaucoordonneD.htm#D.%2033
- Version light de l’extrait du Moniteur 

- une adresse centrale pour toute information relative à ce nouveau cadre juridique : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

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