Les systèmes de collecte à la maison

Dans ce billet, le jeune réseau de l’assainissement durable vous présente les différents systèmes de collecte à la maison pour vous aider à voir plus loin que l’image des toilettes sèches avec le seau et le compost.

Comment faire pour que ces déchets « humains » soient valorisés ? L’agriculture semble une filière souhaitable, voici une base de réflexion.

Bonne lecture !

Le jeune réseau de l'assainissement durable tient à énoncer une toute nouvelle vision qui constitue en même temps les bases de nouveaux paradigmes pour le génie sanitaire.

En réalisant une symbiose avec l'agriculture, l'assainissement durable se doit de restaurer les cycles de matières.

Ses objectifs sont donc, dans le cadre de la gestion des flux organiques et aqueux :

Nous sommes bien conscients qu'il est nécessaire de s'adapter aux conditions psycho-sociales et culturelles des populations et qu'il nous faudra recourir à de multiples ingénieries écologiques, bien qu'une majorité de techniques de l'assainissement durable existent déjà, et sont bien au point.

Pour ce faire par exemple, le réseau de l'assainissement durable préconise la séparation à la source des flux d'eaux usées et une gestion spécifique des différentes fractions.

Ainsi, une première grande distinction doit se faire entre les eaux dites grises et les eaux dites noires ou vannes. Pour faire simple, les eaux noires sont les eaux issues des toilettes et des urinoirs et les eaux grises sont les autres eaux usées. Les eaux grises sont constituées d'un mélange d'eaux provenant des activités domestiques, à savoir ; cuisine, buanderie, salle de bains et nettoyages.

Cette première classification tient au fait que les eaux noires sont fortement chargées en azote, en phosphore et en potassium. Elles contiennent aussi la majeure partie des pathogènes. De l'autre côté, la charge polluante des eaux grises est constituée de matières organiques de nature différente contenant peu d'azote et de phosphore. Bien que ces eaux représentent 75 à 80 % du volume des eaux usées, leur charge organique est plus diluée.

À caractéristiques différentes, destin séparé ...

Nous relevons, de plus, le fait que si l'usage de l'eau est indissociable des activités ménagères, dans le contexte actuel d'épuration tout-azimut, à moins d’être un poisson, se soulager dans de l'eau, a un poids environnemental considérable. Il nous apparaît dès lors judicieux de ne plus utiliser la chasse d'eau pour emporter nos « déchets humains ». En zones péri-urbaines et rurales, il existe un panel de solutions alternatives au W-C à chasse, plus ou moins innovantes et complexes. Dans les villes, l'usage des W-C à chasse peut paraître incontournable, mais celui-ci peut parfaitement s'inscrire dans un système d'assainissement durable, à la condition principale: « collecter et traiter sélectivement les eaux noires et les eaux grises ».

A titre d'information, nous proposons d'évoquer ici différents systèmes qui en plus de vous faire économiser de 20 à 30 % d'eau, permettront de transformer une pollution aquatique en une ressource indispensable pour la régénération des sols.

Nous aimerions insister sur la diversité des alternatives au W-C, car bon nombre de citoyens s'imaginent devoir revenir aux latrines de nos grands-parents. Et si par chance, ils ont croisé lors d'un festival ou chez un ami, une toilette à litière bio-maitrisée ou TLB (que la plupart d'entre nous appellent : toilette sèche) reste le problème de son acceptation et de sa gestion à l'échelle familiale (qui videra le seau ? Et où ?).

Il faut savoir que de nombreux systèmes ne possèdent pas de seau et n'impliquent pas de devenir maître composteur en sacrifiant quelques mètres carrés dans son jardin.

Dans tous les cas, une fois la fraction des eaux noires (des toilettes donc) retirées des eaux usées, les eaux grises restantes se traitent facilement avec des systèmes extensifs de petite taille, voire avec une grande fosse toutes eaux (grises) ou par simple dispersion sur la parcelle, le pouvoir épurateur du sol étant suffisant. On peut ainsi réaliser qu'en zones péri-urbaines et rurales, le passage à l'assainissement durable rime avec une réduction spectaculaire des dépenses pour le traitement des eaux usées.

Les toilettes sèches : une grande famille

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La plupart des toilettes sèches sont conçues de telle manière à transformer nos lisiers en un compost valorisable en agriculture, ce qui équivaut à boucler les grands cycles naturels, comme celui de l'azote, du phosphore, du potassium et du carbone au niveau de nos besoins physiologiques.

Bien moins durables, certaines toilettes sèches fonctionnent sur un principe d'incinération ou de congélation des déjections. Ces dernières peuvent aussi se trouver ensachées en vue d'être valorisées dans une filière de bio-méthanisation (c'est à dire la production de biogaz). Ces systèmes existent, mais nous ne les recommandons pas. Ce qui apparaît actuellement comme la voie royale sur le chemin d'un monde sain, est l'association des eaux noires avec des déchets cellulosiques, suivie de compostage.

L'assainissement durable n'est certainement pas un retour en arrière mais plutôt un large champ à explorer par l’ingénierie écologique. Les options actuellement utilisées qui fonctionnent sont les suivantes :

Les toilettes à compost se divisent en deux grandes catégories selon qu'il y ait séparation à la source ou non.

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Dans un souci de libérer l'usager d'une toilette de la pratique du compostage, des circuits de collecte pourraient voir le jour.  Les litières de toilettes sèches seraient alors valorisées comme nos déchets de cuisine tantôt par bio-méthanisation et/ou par compostage (industriel).

Finalement afin d'éviter les vidanges fréquentes, on peut aussi remplacer la TLB classique par un W-C à chasse économique équipé d'un broyeur. Les effluents liquéfiés sont envoyés à travers un tuyau sous faible pression (quelques dizaines de millibars) sur une aire d'imprégnation de litière aménagée au jardin ou les déjections humaines peu diluées seraient stockées dans des cuves étanches en attendant de rejoindre un site de bio-méthanisation et/ou un centre d'imprégnation.

Le centre d'imprégnation (il en fonctionne déjà plusieurs en France) est un espace de pré-compostage où des effluents aqueux sont aspergés sur une litière carbonée (paille, copeaux, broyats de déchets verts ou de carton). L'ajout de lisiers humains riches en azote, phosphore et potassium possédant une pré-structure humique, à une source de carbone végétale permet de produire en un premier temps un fumier pour fertiliser et par la suite du compost pour régénérer les terres agricoles.

Une nécessaire valorisation agronomique

N’en déplaise aux « scatophobes » ou « coprophobes », le réseau de l'assainissement durable soutient la nécessité de recréer le lien qui doit exister entre l'assainissement et l'agriculture.  Le retour conjoint des déjections humaines et animales dans le processus de formation de l'humus pour le sol est une nécessité pour sauver nos terres agricoles de la dégradation totale et de leur disparition par érosion. Vers une production alimentaire durable, il n'y a pas d'autre chemin.  Notre alimentation vient de la terre, il est donc logique que nos déjections y retournent aussi, mais pas n'importe comment.

L'assainissement durable, en remplaçant progressivement les fertilisants de synthèse par des amendements organiques aura à long terme une série de conséquences favorables :

L'assainissement durable est un premier pas important sur le chemin qui conduit vers la sortie de  nos problèmes actuels liés à l'eau : pollution, inondations, sécheresses, manque d'eau. Notre message est porteur d'espoir. En moins de deux générations (environ 50 ans), nous avons une chance de sortir de tous nos problèmes d'eau à condition de prendre dès à présent les bonnes décisions. Même si le passage au nouveau système sera progressif, il est impératif de fixer les objectifs à atteindre et de formuler les nouveaux paradigmes pour nous guider dans le choix des techniques axées sur le développement durable.

Remarques

La peur des excréments peut s'expliquer en partie par le manque de mesure d'hygiène du passé qui déboucha sur les grandes épidémies tel que le choléra. L’évacuation puis l’épuration des eaux avait donc sa place dans ce contexte historique. Son essor technologique coïncida avec une période plus récente d’abondance en tout et plus particulièrement en énergie bon marché. La volonté d'évacuer les eaux usées des habitations et des villes et de les épurer au mieux a fini par occulter un aspect important de l'assainissement : les liens nécessaires avec l'agriculture. Même s'il arrive qu'au travers des processus actuellement utilisés des sous-produits, comme les boues, soient valorisés, cela se fait seulement après une dégradation importante de la matière organique et donc des pertes énormes pour la biosphère. De plus, les filières actuelles ont un coût très élevé pour une protection de l'environnement. 

Le réseau de l’assainissement durable préconise un changement fondamental de paradigme : la notion même de l’épuration est à repenser au profit de la valorisation intégrale de nos eaux usées comme objectif principal.

Les déjections de 7 milliards d'humains ne sont pas une « quantité négligeable » qu'on peut détruire sous prétexte d'épuration (en Belgique cela représente par an plus de 5 millions de tonnes de matières organiques). Les lisiers humains contiennent plus de 80 % de l'azote, du phosphore et du potassium des eaux usées. C'est donc là une source concentrée de nutriments. La production d'engrais minéraux azotés (à partir de l’azote de l’air) est très énergivore ; la volatilisation dans l’air de l’azote des eaux usées en station d’épuration par nitrification/dénitrification l’est aussi. Nous nous trouvons actuellement dans un système avec une double consommation.  Quant au phosphore et au potassium, ce sont tous deux des ressources non-renouvelables susceptibles de connaître un pic de production et par la suite une chute de l'offre. Dans le cas du phosphore, le pic de production est estimé à 2050. Selon différents rapports Suédois, c'est entre 20 et 30 % des engrais chimiques qui pourraient ainsi se voir remplacés par les lisiers humains, correctement traités. A cela il faut aussi ajouter le lisier des animaux qui devrait aussi entrer dans la même filière de production d'humus.

Toutes ces données plaident en faveur d'une plus grande valorisation agronomique. Dans une société ou l'alimentation est centralisée/collectivisée, il est important que les filières d'assainissement et de valorisation le soient aussi. Et ce afin d'éviter la fertilisation accrue de parcelles privées qui ne servent que très peu à la production alimentaire.

Les petits plus : pendant le compostage des eaux noires, les résidus de médicaments sont en grande partie (peut-être totalement) détruits. Actuellement, aucun système d'épuration n'est capable de les éliminer de l'eau. De plus, ce compostage dégage une quantité considérable d'énergie thermique de basse température, probablement valorisable pour le chauffage de serres.

Les idées principales :

 Source des illustrations : Exposant d